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Portrait #5 : Kaduceo, l’IA et les données de santé pour aider les hôpitaux à gérer les crises



Experte en traitement de données de santé, la startup healthtech Kaduceo permet aux hôpitaux et aux cliniques d’utiliser les données de leur activité pour optimiser, prévoir et améliorer le parcours de soins. La crise Covid-19 a accéléré la nécessité d’utiliser les données en temps réel. Interview de Cédric Giorgi, directeur général adjoint et associé de Kaduceo.


 

La crise Covid a-t-elle fait évoluer l’activité de Kaduceo ?

L’entreprise dont l’expertise est le traitement des données de santé a vécu une année assez hors norme car la crise sanitaire a montré à grande échelle à quel point l’analyse des données de santé est utile pour les prises de décision des services hospitaliers et pour la gestion des parcours de soin. Nous l’avons constaté à l’échelle de Kaduceo mais c’est également vrai au niveau national. Le compte de Santé Publique France a été créé sur le portail de données publiques data.gouv.fr seulement en mars 2020 en pleine première vague du Covid-19. Cette mise à disposition des donnés montre un changement culturel important pour la santé publique. La crise a clairement accéléré la prise de conscience de l’intérêt de l’usage en temps réel des données, du côté des hôpitaux, des chercheurs et des patients.


Quel rôle a pu jouer Kaduceo ?

Historiquement il faut savoir que nous avons deux types activités pour les hôpitaux : une activité d’analyse et d’optimisation des données de facturation de l’hôpital (codage PMSI) qui nous a permis, depuis la création en 2014, d’avoir une cinquantaine d’établissements clients, et une activité centrée sur le parcours de soins que nous déployons sur une demi-douzaine d’établissements hospitaliers, comme le Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil (CHIC), le CH de Bastia. Avant la crise Covid nous avons accompagné des hôpitaux par exemple sur la prédiction des urgences, la nécessité de faire face à l’afflux de patients et les risques de sur-engorgement. Notre métier est de développer des algorithmes, d’analyser, d’optimiser et de prédire les parcours. Avec les modèles d’intelligence artificielle, nous avons montré qu’il est possible de mettre en relation un grand nombre de variables de tous types (météo, qualité de l’air, événements culturels, trafic, etc.) et de construire des modèles prédictifs. Puis quand est arrivée la crise Covid, nous avons proposé à nos clients établissements hospitaliers de mettre en œuvre un tableau de bord spécifique.


Comment suivre et prédire le parcours de soins des patients Covid ?

Chez Kaduceo, nous travaillons historiquement avec les données du PMSI (données medico-administratives) qui précisent les actes de consultation, examens, hospitalisation et permettent de retracer le parcours d’un patient. Dans le cas du Covid-19, il a fallu travailler avec des bases spécifiques (projet complet décrit ici) mais la logique est la même : construire un modèle prédictif basé sur des séries temporelles. Pour certains hôpitaux qui n’avaient pas encore travaillé avec nous sur les parcours de soins, au-delà de la prédiction que nous leurs avons fournie, les tableaux de bord complets de suivi d’activité Covid-19 ont constitué un vrai changement, tout se faisant auparavant sur Excel.


Quelles sont les attentes du marché en matière de médecine prédictive ? Il y a beaucoup de bruit autour de la médecine prédictive qui est un des éléments majeurs de la tendance 4P : prédictive, personnalisée, participative, préventive. Sur le volet prédictif, nous n’en sommes encore qu’au début car avant de pouvoir déployer un modèle prédictif, il faudra bien évidemment le faire valider par une étude clinique qui prouve l’efficacité et la véracité du modèle.

Aujourd’hui, les outils proposés sont plutôt des outils dits « compagnons » c’est-à-dire qui apportent un indicateur au médecin pour l’aider dans sa prise de décision, et l’IA intervient encore plus du côté organisationnel que du côté clinique.

Sur les sujets d’IA et de santé, comme dans d’autres domaines sensibles, il y a aussi la nécessité absolue de l’explicabilité de l’intelligence artificielle. Le principe de la « boite noire » et le fait qu’aujourd’hui on n’est pas capable d’interpréter et d’expliquer tous les ressorts de l’IA sont un frein réel. Et puis il faudra aussi que le médecin, le service et le patient s’approprient l’idée qu’un modèle d’IA a un rôle dans le parcours de soin. Nous ne sommes qu’au tout début !


Quelle est la stratégie de Kaduceo ?

L’année 2020 a été si particulière qu’elle a retardé un peu des choix stratégiques que nous prévoyions de confirmer. Parmi la diversité de sujets que nous adressons, nous allons définir les domaines sur lesquels nous allons accélérer, je pense en particulier au travail sur les data sets. Nous avons dans ce domaine une très forte expertise. Il s’agit de la phase un peu ingrate de gestion de la donnée et d’analyse du potentiel des data sets. Souvent les hôpitaux ignorent ce qu’ils peuvent faire de leurs données , quelle est leur valeur, comment les exploiter à des fins de recherche, etc. C’est aussi dans cette phase de valorisation des données, avant qu’elles soient transformées en IA ou en modèle, que Kaduceo a une forte valeur ajoutée.


Quel l’intérêt a un hôpital à utiliser et valoriser les données de ses patients ?

En tout premier lieu, la recherche a besoin de se baser sur des données (big data ou small data), que l’IA soit utilisée ou pas. Ensuite, il y a les aspects financier et organisationnel, tout ce qui permet à un établissement hospitalier d’améliorer son organisation, d’éviter que le manque d’organisation devienne aussi un problème financier et administratif, etc. Le troisième intérêt à utiliser les données est d’ordre clinique avec  la mission de proposer le soin le plus adapté dans les meilleures conditions. Tous les hôpitaux et notamment les plus petits n’en ont pas encore véritablement conscience. Ils disposent d’un DIM, un Département des informations médicales mais dont la mission resté concentrée sur la gestion du codage de l’activité et non pas l’usage de la donnée pour améliorer la pratique.


Quelle est votre vision du secteur français de la healthtech ?

Nous sommes globalement très bien positionnés en France et même si certains secteurs sont ralentis par la crise, la demande est là, les investisseurs aussi et les partenaires s’ouvrent. À Toulouse par exemple, nous avons de grands atouts avec un écosystème qui ne demande qu’à accélérer : de très bons établissements de santé, d’excellents instituts de recherche, des startups et le secteur de l’aéronautique qui a des compétences en matière de systèmes embarqués et d’IA qui peuvent tout à fait s’appliquer à la santé. L’essentiel est donc de décloisonner les spécialités. C’est le message que je porte pour Kaduceo mais aussi au nom de La French Tech Toulouse : ouvrons-nous, décloisonnons car l’innovation ne vient que de la rencontre et de la friction entre les différentes spécialités et les angles d’attaque.


L’écosytème healthtech est-il structuré à Toulouse ?

Mon parcours m’a conduit à découvrir des secteurs d’activité et des écosystèmes très différents que j’ai toujours eu à cœur de fédérer. Aujourd’hui je suis très impliqué au sein de La French Tech et il me semble important de regrouper les énergies de la trentaine de startups healthtech toulousaines. Nous avons constitué un groupe informel pour l’instant avec des startups comme MonOrdo, Covirtua, iMeds Healthcare, Medelse pour ne citer que celles-ci mais nous appelons à nous rejoindre toutes les startups healthtech (medtech, biotech, digital health). L’objectif est d’échanger un peu plus entre nous parce que l’on a tous tout à gagner à être collectifs.


L’équipe de Kaduceo compte de nombreuses femmes, est-ce le résultat d’une politique volontariste ?

Je dirais que les effectifs sont à 50/50 femme / homme. Noémie Salaün-Penquer est notre responsable Data et son équipe est composée de 8 personnes dont 6 femmes. Avec Matthieu Ortala, président et fondateur de Kaduceo, nous avons la volonté de constituer une équipe diversifiée, aussi bien en termes de genre que d’origine. La diversité créé la richesse et cela nous semble d’autant plus important que Kaduceo adresse des sujets liées aux données de santé. Nous avons besoin de regards multiples pour progresser. Il y a peut-être aussi deux autres explications à la forte présence de femmes dans nos équipes : Noémie est la première collaboratrice historique de Matthieu et dans l’univers de la tech les femmes attirent les femmes. Enfin le secteur de la data science compte davantage de femmes que le développement web qui lui peine toujours à sortir de schémas très masculins.


 

Propos recueillis par Emmanuelle Durand-Rodriguez


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